Coronavirus - toujours

Le 08/04/2020

Dans Humeurs

La sortie n'est pas encore vue, peut-être le bout du tunnel pour le Grand Est, pas encore pour l'IDF, et la progression du virus peut-être en vue pour d'autres. Cette situation unique prédispose à quelques réflexions.


Le retour
de l'humain ?


Dans cette situation unique de confinement et de cessation partielle des activités, la survie est assurée par la technologie, qui permet le télé-travail, les relations à distance, l'espoir de guérir et prévenir le virus.
Mais une chose plus inattendue, c'est aussi le retour de l'humain. Car si les commerces alimentaires sont ouverts, si le plates-formes assurent les livraisons, si nos vieux ont encore des soins dans les EPHAD, si nos rues restent propres, si les hôpitaux assurent leurs missions, on le doit à ces derniers de cordées si maltraités depuis des décennies.

Depuis des années, on ne veut voir que les jeunes loups créateurs de high tech, les cadres commerciaux et financiers formés au moule des grandes écoles, les pdg et DG aux salaires mirobolants qui se prennent pour Dieu, les développeurs informatiques qui nous ouvrent un monde automatisé pour une satisfaction spontanée de tous nos besoins grâce au graal des "big data"!

Dans les entreprises, on ne parle que rentabilité, taux de retour sur investissement, parts de marchés, optimisation des processus, taux de remplissage, productivité, automatisation et robotisation, flux tendus, digital, virtuel.

Et puis voilà-t-il pas que notre salut est assuré par ces derniers de cordée, ignorés, déconsidérés, méprisés, sous-payés ! 
Voilà-t-il pas qu'ils vont au travail malgré les risques, pour que les gens puissent toujours être soignés, toujours être nourris! 
Non seulement ils sont mal-traités, oubliés, mais en plus ils ont une conscience professionnelle !

S'en souviendra-t-on ? 

 

Voir mon article du 17/12/2019 sur la nécessité humaine et économique de revaloriser le SMIC

On ne paie pas
le prix des choses

La mondialisation aura eu un effet bénéfique avec une conséquence néfaste.

Elle aura contribué largement à baisser les prix, à rendre accessible des biens qui ne l'étaient pas ou peu. Un t-shirt à 7€ n'est pas possiblement français, pas plus que les PC à 500€ ou les smartphones à 200€. En profitant de l'écart de richesses entre les nations, les commerces de tout bord, et en premier la grande distribution, se sont approvisionnées aux quatre coins du monde pour trouver le plus faible prix possible.

Mais non seulement cela a contribué à tuer les entreprises européennes, incapables de soutenir la concurrence, mais cela nous a habitué à ne pas payer le prix des choses. C'est vrai dans l'agriculture, où le temps, le travail, les risques, le respect des normes, ne sont pas regardés. Ce n'est plus le produit chinois qui perçu peu cher, mais le produit français qui est perçu comme cher, avec l'idée spontanée que le producteur et le distributeur s'en mettent plein les poches.
C'est vrai pour tous les secteurs de l'économie concurrencés par les pays à bas salaires. 

Ce sont les Etats qui ont libéralisé les échanges, mais ce sont les distributeurs et nous les consommateurs qui ont permis les dégâts occasionnés.
En augmentant le pouvoir d'achat du consommateur occidental, la mondialisation a permis aux entreprises de moins récompenser le travail, notamment celui des "derniers de cordée", et a condamné à mort une grande partie de l'appareil productif européen.

Ce ne sera pas facile de revenir en arrière, parce que les usines et le savoir qui va avec sont morts, mais aussi parce qu'on ne sait plus le prix des choses, qu'on n'est pas prêt à le payer, et que les entreprises ne sont pas prêtes à augmenter les salaires pour qu'ils soient adaptés au prix du "made in France".

Et l'Europe ?

Chefs d'Etats et ministres des Finances échouent à s'entendre. Une crise sanitaire qui met en danger la vie de milliers de personnes ne suffit pas à mettre en second plan les nationalismes. Cette fois, ce sont les Pays-Bas et l'Allemagne, deux pays de l'ouest à l'origine même de la création de l'Europe, qui refusent un accord qui pourrait faire payer les plus riches pour aider les plus pauvres.
Pour les dirrigeants de ces deux pays, le riche est perçu comme le bon élève, le pauvre comme le mauvais. Et le bon élève refuse de risquer de devenir moins bon en aidant le mauvais.

Si l'Europe échoue à s'entendre dans de pareilles circonstances, si les égoïsmes nationaux se révèlent plus forts que la solidarité, alors il faudra être bien fou et crédule pour croire encore que l'Europe a un avenir.
Si l'Europe échoue, elle le devra en large part à Merckel, qui à la différence de ses prédécesseurs n'a insufflé aucun élan à l'Europe, se contentant de rabâcher toujours et encore son credo de rigueur financière.
Avec ce seul credo, il n'y aurait pas eu l'Europe, l'euro, la réunification allemande, ni le New Deal qui a permis la reconstruction allemande.
Les grandes décisions vont rarement avec l'obsession de la rigueur budgétaire.