Fusion PSA Opel. Un mal nécessaire?

Le 19/02/2017

Dans Humeurs

OpelLe groupe PSA étudie le rachat d'Opel, la filiale européenne de General Motors. Sauvé de la faillite par l'Etat, pourtant honni des capitalistes, PSA a raté la mondialisation, pour n'être plus qu'un nain face à ses concurrents européens. Il est à ce titre symbolique de la frilosité de l'industrie française et de sa faible adaptation à un une concurrence mondialisée.

C'est une opération logique dans le jeu du capitalisme mondialisé

Ope psaOpel est déficitaire depuis plus de dix ans, et sur un marché allemand très compétitif avec des marques aussi prestigieuses que Mercédes, BMW, Audi  ou Volkswagen, a bien du mal à maintenir sa place. D'autant ques ces marques plutôt haut de gamme, voire prestigieuses, se sont démocratisées, et ciblent aujourd'hui tous les marchés par une gamme de voiture très étendue.

Après des déboires dont il s'est sorti grâce à l'appui de l'Etat, PSA retrouve quelques couleurs. Il reste cependant fragile, et n'a pas la dimension mondiale, loin s'en faut, la production mondiale de PSA étant inférieure de moitié de celle du Groupe Volkswagen.

Certes la taille ne fait pas tout.
Mais on n'est moins vulnérable quand on est gros, on est plus crédible financièrement vis à vis des banques, des actionnaires, des Etats, des fournisseurs. En cas de difficultés, il est plus probable que les Etas chercheront éviter la faillite et la casse sociale qui s'ensuivrait, c'est ainsi que Renault, Citroën et Peugeot ont toujours été assistés quand la nécessité le demandait.

La taille permet aussi des économies d'échelle, en regroupant centrales d'achats, logistique, usines, recherche. Dans un monde où la profitabilité fait loi, où il faut afficher sans cesse des profits et un taux de profit en perpétuelle croissance pour espérer rester attractif aux yeux des investisseurs et actionnaires, la recherche de la taille est incontournable.

Des synergies commerciales sont peut-être possibles aussi, au niveau des réseaux de distribution, notamment dans les pays où les marques sont peu ou mal implantées, des modèles, de la communication.

Mais néfaste sur le plan humain

Si on veut que 1+1 soit supérieur à 2, il faut qu'on puisse produire 2 avec moins de charges que la simple addition de celles supportées par les groupes avant la fusion. Les charges de personnel sont les premières ciblées, et il faudra s'attendre, malgré les promesses fallacieuses, à des milliers de suppressions de postes. Au bout du compte, ces opérations capitalistes et productivistes suppriment l'emploi, pour une contrepartie pas évidente.

Opel 1En tous cas elle n'est pas dans l'amélioration des conditions de travail. Bien au contraire. Outre que les salariés restants ont à gérer dans des délais toujours les plus brefs possibles, la lourdeur de l'opération de fusion, la "géantisation" des entreprises va de pair avec une déshumanisation de moins en moins supportable. La personne s'y efface au profit du matricule, le travailleur y est réduit au seul paramètre de coût, le salarié n'y est plus qu'une variable d'ajustement.

Pour gouverner ces grands groupes, on fait appel à des têtes présumées bien faites, anciens cadors de leurs grandes écoles et Universités, mais qui ne connaissent l'entreprise que par le prisme de ratios, graphiques, indicateurs. Gestion déshumanisée, asservie à la dictature de la rentabilité imposée par les actionnaires et leurs serviteurs que sont devenues élites dirigeantes. Dans ces grands groupes, le décalage est grand entre la grande majorité des salariés et les dirigeants, le fossé d'incompréhension est devenu infranchissable, amenant stress et déplaisir au travail. La reconnaissance y est absente, la rémunération des efforts ne concerne qu'une minorité privilégiée de cadres, ceux qui sont les plus proches des dirigeants, et les plus serviles.

Enfin si big is beautiful dans notre monde capitaliste, la course à la taille a aussi ses limites, et la lourdeur de la gestion est si pesante que de plus en plus de jeunes sont tentés par l'agilité, la réctivité et la responsabilité des start-ups.   

Et pourtant ...

Et pourtant, le monde capitaliste est tel que l'opération se fera, et qu'il faut même sans doute la souhaiter, même si le succès est loin d'être garanti. Fusionner deux grandes entreprises à la culture affermie, aux langues différentes, concurrentes depuis des décennies sur un même marché, n'est pas chose facile. Mais c'est sans doute la condition de la survie de l'une et de l'autre. A condition que le nouvel ensemble ne vise pas que l'accroissement du profit par les seules économies de coûts, salariaux pour l'essentiel, mais ait aussi pour objectif l'augmentation de leurs parts du marché mondial, ridiculement faibles aujourd'hui.

En France, une voiture sur deux est de marque étrangère. A l'étranger, plus on s'éloigne du pré-carré, moins la présence d'un groupe comme PSA est voyante. On ne voit que des voitures allemandes en Europe de l'Est. Mais c'est pareil en Chine, où pourtant Citroên est installé depuis très longtemps. En quelques décennies, l'industrie automobile s'est faite totalement distancer par ses collègues et concurrents allemands. Frilosité commerciale? Faiblesse des investissements? Trop grand attachement à la rentabilité immédiate? Erreurs de marketing?

Le Médef n'y verra que le rôle nuisible de l'Etat qui écrase les pauvres entreprises de charges qui grèvent la compétitivité. Trop facile! Les coûts salariaux en Allemagne sont pas éloignés de ceux de la France, et la réussite mondiale de Volkswagen, devenu n°1 mondial, ne s'explique évidemment pas par les écarts des charges sociales.

PSA symbolise cette industrie française qui perd des parts de marché sur son territoire, et arrive mal à s'imposer à l'étranger. Il ne faut pas voir ailleurs la montée du chômage depuis trente ans. L'industrie française a perdu de sa compétitivité, et pas seulement à cause de ses coûts du travail, car il n'y a pas de différence avec l'Allemagne. Mais par peur du risque à l'international, par mépris du client et de ses besoins, par la recherche de la rentabilité à court terme aux fins d' enrichissement des actionnaires et dirigeants.

Tant que ce constat ne sera pas fait, les entreprises continueront de disparaître et le chômage d'augmenter.